Dieudonné a pété les plombs


Ce qui s’est passé sur la scène du Zénith mérite qu’on s’exprime vigoureusement. Dieudonné a fait monter le révisionniste Faurisson sur scène et lui a décerné un diplôme, remis par un acteur vêtu d’un habit rayé de déporté avec une étoile juive cousue dessus, en présence de milliers de spectateurs complices.
Cette mise en scène grotesque est pathétique. Elle est choquante et n’est pas pardonnable. Quel que soit le niveau de tolérance d’une société, une telle mascarade est intolérable. Un artiste ne devrait pas avoir le droit d’user de sa notoriété pour organiser un spectacle dont l’indécence n’a d’égal que le dégoût qu’il suscite. Les organisateurs d’une salle de spectacle comme le Zénith se décrédibilisent en autorisant ce qui s’est passé.
Dieudonné est tombé bien bas, au niveau de la fange où se complaisent ceux qui perdent le sens de la mesure et qui ne comprennent pas quand la limite du mauvais goût a été largement dépassée. On peut mener ses combats et penser ce qu’on veut de l’holocauste, mais certains actes sont interdits car leurs motivations proviennent des parties les plus méprisables de nous-mêmes, de celles qui ne sont pas tout à fait humaines.
Que Le Pen soit présent au spectacle n’étonnera personne, bien qu’il ait depuis pris ses distances en admettant que ce qui s’est passé était choquant, ce qui a dû navrer Dieudonné. Par contre, je suis abasourdi qu’une militante pro palestinienne, Ginette Skandrani, se soit déshonorée en étant dans la salle. Les gens mélangent tout et confondent combats honorables et actes irresponsables. Quel message fait elle passer à ceux qui ont de la sympathie pour sa cause mais qui seront perplexes devant sa complicité dans une telle mascarade.
Que de haine, que de rancœur et d’esprit de revanche dans le cœur de Dieudonné ! Je le plains de ne plus trouver d’autre moyen pour évacuer ce qui le ronge, de l’acide qui en fait un être méprisable. Dieudonné souffre, c’est certain. Seule une intense souffrance peut mener à déraper ainsi. On a dit justement « il n’est point de méchants, il n’est que des souffrants ». Dieudonné est un souffrant. Il sait qu’il a commis là « sa plus grosse connerie » mais il s’est payé le luxe de la commettre. Comme si on pouvait impunément se payer de tels luxes. L’illusion qu’il puisse le faire, vu son statut privilégié, en dit long sur son ego distendu. Il se vante de provoquer, et déclare lors d’interviews qu’il tire une grande fierté d’être plus critiqué que Le Pen. On a l’impression que Dieudonné cherche par tous les moyens à faire partie du panthéon des infréqentables et qu’il s’enorgueillit d’être "au hit-parade des enculés de France", selon ses propres dires. Chacun prend son pied où il le trouve. Lui, Dieudonné, cherche à se faire détester. À croire qu’une série de visites chez un psy pourrait lui faire le plus grand bien...
Certains actes disqualifient à perpétuité. Un tueur d’enfant, un tortionnaire et un braqueur de banque commettent des actes qui auront un impact sur le reste de leur vie. Je ne peux concevoir que, toutes proportions gardées évidemment, le scandale du Zénith n’ait pas d’incidence sur le futur de Dieudonné. Même si on trouvait à Dieudonné du talent ce qui, je l’avoue, n’est pas mon cas, aucun talent d’artiste ne peut excuser la mise en scène préméditée à laquelle s’est livrée un pauvre bougre pathétique qui laissera le souvenir d’un imbécile qui s’est égaré dans les méandres nauséabonds de l’extrême droite.
Dieudonné a ses convictions, c’est son droit. Mais aucune conviction ne justifie de l’exprimer aux dépends du malheur de ceux, Juifs ou non, qui sont morts dans d’atroces conditions. Beaucoup d’entre-vous ont eu des parents qui sont morts en camp de concentration. Moi, mon oncle Pierre, résistant Français, y a péri. C’est dire que Faurisson a tout faux et que cet imbécile de Dieudonné a bien tort de le porter aux nues, lui et ses thèses de merde.
Dieudonné s’égare. Il ne fait plus spectacle, il règle des comptes sordides sur scène et roule pour des gens qui l’utilisent. Ce pauvre bougre, aveuglé par sa haine, ne s’en rend pas compte. Il est parti en guerre contre les Juifs alors tout lui est bon. Demander à Le Pen d’être le parrain de son enfant est un acte de foi aussi stupide que futile, aussi déplacé qu’inutile. Faire l’éloge d’un révisionniste et le diplômer de la main d’une personne déguisée en déporté Juif est pour lui un moyen de se venger. Plus il agit, plus il s’enfonce. Bientôt. Dieudonné n’aura plus de public autre qu’une ribambelle d’huluberlus d’extrême droite aussi paumés que lui, aussi nauséabonds et égarés.
Je mène, comme tant d’autres, mes combats dans l’honneur. Je ne me reconnais en rien dans ce que fait et ce qu’est Dieudonné, un individu à qui, un jour, la chance a souri, qui a connu la notoriété, mais qui s’enfonce dans les latrines de l’histoire méprisable. Ce qui trahit, soit dit en passant, le médiocre niveau mental de l’intéressé. Car un individu doué d’une once d’intelligence pourrait-il agir de la sorte ? Je doute que Dieudonné se ressaisisse. Il est tombé trop bas pour encore avoir le ressort de s’extirper du bas-fond qu’il fréquente désormais. Il s’est enfermé dans une paranoïa jusqu’auboutiste et s’est condamné à une fuite en avant.
J’ajouterai que Dieudonné fait preuve de lâcheté et de couardise. Il a soigneusement calculé sa provocation, en évitant ce qui l’aurait condamné. C’est à une sorte de jeu d’échec auquel il se livre. Comme tous ceux qui flirtent avec les limites légales, Dieudonné commettra un jour une erreur pour laquelle il paiera. Il inspire un mélange de pitié, de dégoût et de répulsion.
On ne vient pas à bout d’un chancre en le méprisant. On le combat. Dieudonné et ses semblables doivent être combattus et doivent quitter la scène. De toute façon, on est de moins en moins à rire de tes pitreries mon pauvre Dieudonné. D’ailleurs, entre les déprogrammations et la lassitude des spectateurs, il ne sera bientôt plus qu’un très lointain souvenir. Et ce sera tant mieux. S’étant lui-même disqualifié, il n’aura que ce qu’il mérite. On ne joue pas avec de la nitroglycérine sans qu’un jour ça nous pète à la gueule. En attendant, ce qui a déjà pété chez Dieudonné c’est les plombs.
Ashoka